lundi 27 décembre 2010

e-commerce : deux pharmaciens devant le tribunal

Deux pharmaciens troyens étaient poursuivis pour avoir vendu sur internet des produits étiquetés comme « médicaments »

L'audience correctionnelle d'hier a été consacrée à une seule affaire : deux pharmaciens troyens ont-ils été coupables d'exercice illégal de la pharmacie pour avoir, d'avril 2007 à juillet 2008, vendu sur internet des produits relevant du monopole des pharmaciens ?

 
Luc Seigneur et Jérôme Mougeville, par ailleurs associés à la tête de la pharmacie du 1er-Mai, s'en défendent : « On a juste été précurseurs et maladroits. »

En 2007, alors que l'ordre national des pharmaciens se montrait totalement hostile à toute perspective d'e-commerce, les deux Troyens décident de se lancer : « De plus en plus de sites se montaient. » Ils expliquent avoir demandé à leur expert-comptable de trouver des statuts qui leur permettent de rester dans les clous.

De là, fut créée la SARL Pharmajet, où étaient associés les deux pharmaciens et un informaticien, avec l'objectif de commercialiser par le biais de son site « pariscosmetic.com », des « produits cosmétiques, pharmaceutiques et parapharmaceutiques ».

Question de monopole

Le président du syndicat des pharmaciens de l'Aube, Denis Brugirard, reconnaît avoir passé plusieurs « commandes pièges » concernant des articles relevaient du monopole de vente des pharmaciens.
Plainte a été déposée. L'enquête du SRPJ a conclu à la présence de 339 de ces produits inscrits au Code de la santé publique sur les 7 000 mis en vente. Rien de ce qui est délivré sur ordonnance (sauf un vermifuge pour chat) mais des tests de grossesse, des bandages et pansements, du liquide pour nettoyer les lentilles de contact, des gélules aux plantes, des aliments pour bébé, des anti-puces pour animaux…

À la barre, Luc Seigneur a joué hier la carte de la démystification. Là où ses confrères évoquent « médicaments » et « risque pour la santé publique », lui affirme : « Ce sont des produits qu'on peut trouver ailleurs que dans une officine : l'anti-puce Frontline est vendu à Jardiland et les gélules aux plantes Arko, au millepertuis ou autre, sont des compléments alimentaires qui, sous d'autres marques, mais aux mêmes dosages sont vendus à la coopérative Hermès. Il n'y a aucun danger. Mais pour montrer notre bonne foi, nous les
avons retirés du site. »

Depuis 2008, tout s'est arrangé. Le Conseil national de l'ordre des pharmaciens a admis la vente en ligne de produits parapharmaceutiques à condition que le site soit fusionné avec une officine. Luc Seigneur et Jérôme Mougeville, sans leur informaticien cette fois, ont donc tout simplement affilié leur site à la pharmacie du 1er-Mai. Reste que leurs confrères gardent en travers de la gorge leur initiative.

e-pharmacie et réglementation

Pour preuves, les parties civiles présentes ou représentées hier : l'ordre supérieur national des vétérinaires, l'ordre régional et l'ordre départemental des pharmaciens ainsi que le syndicat des pharmaciens de l'Aube.

« Depuis 2003, toutes les instances travaillent à la réglementation de la vente sur internet des produits pharmaceutiques. Tout est mis à bas par des gens de notre profession qui veulent être les premiers à prendre des parts de marché. La grande distribution n'attend que cela ! », a fait valoir l'avocat du Conseil de l'ordre des pharmaciens, pour qui les 339 produits incriminés nécessitent d'être vendus sous le monopole des professionnels.

« Pour vendre les produits spécifiques à une officine, eux sont passés par une SARL, s'affranchissant de leur qualité de pharmaciens. Pour aller plus loin dans leur pratique commerciale, ils ont pris des risques pas vraiment calculés pour voir jusqu'où ils pouvaient aller. Ce qui pose problème, c'est qu'ils ne vendent pas de l'électroménager mais des produits qui demandent des compétences et des conseils », a commenté Vincent Jacquey, substitut du procureur. Des peines de six mois de prison avec sursis et des amendes de 3 000 € ont été requises.

Règlement de comptes

« Quand ils ont voulu créer leur site, personne n'était en mesure de leur donner des conseils. On les a laissés se planter, on les a piégés et on les fait condamner. On est dans un règlement de comptes anticonfraternel au possible », a déploré, en défense, Me Gérard Chemla, dénonçant : « Ceux qui se présentent comme les chevaliers blancs ou les ayatollahs de la santé publique s'en tamponnent. La seule motivation, c'est le fric. »
Délibéré au 22 février

Source : (http://www.lest-eclair.fr/)

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